« Nous avons décidé de faire cette session du DipCo en remote, et sur trois jours complets ! Nous allons jouer avec cette contrainte imposée par la pandémie. C’est une grande expérimentation de formation et de facilitation à distance que nous allons vivre ensemble. » Pierre Volant, membre de Codesign-it.
Pierre, accompagné d’une équipe de codesigner et de l’équipe pédagogique du DipCo, a designé et facilité la dernière session du 30 mars au 1er avril derniers : 3 jours à distance avec 25 participants sur le thème de la gouvernance distribuée. Le DipCo n’avait encore jamais expérimenté une session complète en remote. Les circonstances l’ont imposé. C’est maintenant chose faite, et on peut dire que c’est un succès !
Le DipCo, pour Diplôme Codesign, est le Certificat de Spécialisation Professionnelle de Codesign-it en partenariat avec le CNAM (Conservatoire National des Arts et Métiers) et le CRI (Centre de Recherches Interdisciplinaires). Une formation continue sur l’innovation et la transformation collaborative dans les organisations et les projets complexes. Avec une méthode : apprendre en questionnant, apprendre en faisant, apprendre en partageant. 3 jours par mois donc, organisés en présentiel en général dans les locaux parisiens de Codesign-it!
Mais comment passer d’une session en présentiel à une session 100% digitale, qui plus est, sur trois jours ? Est-ce vraiment possible ou doit-il y avoir des renoncements ? Ou au contraire cela crée-t-il de nouvelles opportunités ? Et si cela transformait le DipCo de demain ?
Le design initial de la session n’avait pas été pensé pour être faite en remote. Il a été choisi de conserver le design et l’intention associée et de l’adapter à la contrainte de la distance, sans renoncements à priori (faute de temps, seule une séquence a été supprimée par rapport au design initial).
Voici donc quatre indispensables, tous interdépendants, qui semblent avoir contribué au succès de cette session 100% digitale :
1. Une équipe de facilitation très complémentaire avec des rôles bien définis !
- Zoom : « notre environnement de travail, notre salle », pour la plénière et les break-outs,
- Google Drive « nos panneaux blancs, nos templates » regroupe la centralisation des contenus et la production collaborative,
- WhatsApp : « nos échanges informels » hotline, petites annonces et communication.
Un temps de prise en main des outils est prévu en début de Jour 1 (présentation, formation et partage des bonnes pratiques). Tout au long de la session Clément assure la hotline technique de la session.
L’apport de la Facilitation Graphique à la distance est particulièrement notable ! Elle est essentielle car elle permet une représentation visuelle commune et partagée par tous. Elle rassemble autour d’un objet commun. L’écran est l’objet central de chacun ; la production visuelle le devient aussi quand elle est partagée.
Pendant cette session, les facilitateurs graphiques ont pu faire l’expérience d’un knowledge wall à distance (représentation visuelle évolutive du déroulé des trois jours de sessions) mais aussi de fournir en « push » des représentations visuelles plus ponctuelles et parfois humoristiques qui participent grandement à la convivialité au sein du groupe.
« La facilitation graphique apporte de la joie, de la gaieté et des couleurs ; mais aussi des souvenirs à notre session. » Véra, participante
Tout au long des trois jours, on sent la grande complicité et la fluidité des échanges dans l’équipe qui, à chaque temps de travail en sous-groupes, à chaque pause ou fin de journée, se regroupe (dans une salle Zoom dédiée) pour faire le point et éventuellement adapter le design de ses prochaines séquences. Des adaptations, il y en a eu quelques-unes ; mais finalement assez peu en cours de journée. Ce qu’on attribue notamment à la grande préparation l’anticipation de l’équipe en amont de la session.
2. Une préparation bien ficelée qui allie exhaustivité et simplicité !
Chaque session du DipCo demande un temps de préparation non négligeable. Pour celle là, l’équipe a d’autant plus misé sur une anticipation maximale qui laissera une part limitée à l’imprévu.
« La tentation naturelle dans une session en présentiel est d’intensifier le travail collectif et les interactions. Mais là (et c’est encore plus possible dans une période de confinement) on est allés encore plus loin dans la pédagogie inversée. On a fait plus de place au travail personnel des participants : Qu’est ce qui est important pour moi et que je veux creuser ? Comment ce que je viens d’apprendre s’articule-t-il avec ma trajectoire personnelle ? » Alain Biriotti, membre de Codesign-it et de l’équipe pédagogique du DipCo.
3. Un design rythmé et responsabilisant !
Le digital demande à anticiper au maximum le process mais on doit pouvoir jouer avec les rythmes tout en responsabilisant les participants pour servir l’intention.
- PLÉNIÈRES pour l’accueil, les restitutions, les temps de consignes, la réflexivité et les fins de journées
- BREAK-OUTS en groupes restreints pour les temps de production, les échanges avec les intervenants. Au préalable chacun se sera positionné sur un sujet via le Slide Deck. L’outil Zoom permettant une répartition très rapide de chacun et, si on le souhaite un enregistrement vidéo.
- TEMPS INDIVIDUELS, pour les temps d’inspiration et d’exploration ; mais aussi pour certains temps de production (par exemple : « dessiner ce que vous retenez de la séquence d’inspiration théorique que vous venez de vivre sur la gouvernance distribuée. »)
« Les sous-groupes ont permis des temps de discussion informels – qui existent en présentiel et participent à l’inclusion – mais qui sont impossibles en plénière à distance. On s’est approprié les contraintes du format pour recréer de la convivialité. » Camille, participante
« J’ai beaucoup apprécié l’alternance des temps en plénière, en groupe, ou seule. Le temps individuel est pour moi un temps de récupération, ou j’ai le temps de prendre du recul, de réfléchir, et de potentiellement gérer mes frustrations. » Sandrine, participante.
- Scan Focus Act pour la construction du design des 3 jours dans sa globalité.
- Le dispositif de l’éclaireur : comme une séquence de transition après un travail en sous-groupe, pour un premier croisement de regards et des feedbacks sur les premières avancées des travaux, et ensuite un retour dans le même groupe.
- Des kiosks d’échange avec des intervenants qui ont pu avoir lieu après un temps d’inspiration individuel et qui se déroulent en sous-groupe mixés (on ne reste pas dans son groupe de travail initial et chacun va voir ce qui l’intéresse le plus)
- Du prototypage avec les moyens dont chacun disposait dans son lieu de confinement. Chaque participant a produit une vidéo d’environ 1 minute présentant une représentation de la gouvernance distribuée à son partenaire de confinement. Les productions sont variées, originales et permettent surtout de se détacher de son écran et de faire appel à davantage de corps et de créativité. « Seul ou avec les gens qui vous entourent dans votre confinement et que vous sollicitez (enfants, conjoint…), faites une représentation physique de ce qu’est la gouvernance distribuée. Utilisez des objets (jeux d’enfants, ustensiles de cuisine, etc.). »
« J’ai fait appel à une partie de mon cerveau que je n’utilise pas souvent. » Catherine, Participante.
« Le besoin de matérialiser est d’autant plus fort du fait de la distance. » Christelle, participante
« En présentiel, tu ne peux pas te soustraire au groupe. A distance, cela ne tient qu’à toi de participer. Si tu veux tenir à distance tu dois être engagé ! » Christine, Participante
4. Un attachement particulier à la gestion des énergies et des émotions !
On le sait, il est difficile de rester en place, assis, 7 ou 8 heures de suite ; encore plus sur 3 jours complets. C’est même souvent contre-productif. La distance qu’amène le 100% digital doit être compensée par une gestion de l’énergie du groupe et l’économie personnelle des participants.
L’équipe de facilitation a ponctué les trois jours de temps spécifiques dédiés à l’inclusion et à la gestion des énergies et des émotions.
Les icebreakers et energizers viennent casser le rythme et permettent aux participants de se connecter autrement.
« Je me sens solide et reliée à la communauté, je ne m’attendais pas à ce sentiment là. » Virginie, participante
« Les energizers m’ont fait faire des choses que je n’aurais certainement pas osé faire en présentiel. » Elodie, participante
A plusieurs moments dans la journée, on prend la température. Dans le « chat », outil de conversation de Zoom, chacun se positionne sur une échelle de 1 à 10. On prend le pouls et on ajuste si nécessaire.
« On perd sur un parti-pris du collectif et du DipCo, c’est cette capacité à créer une dimension communautaire. Mais cette première tentative, (il y en a d’autres en cours) ouvre des perspectives en termes de variation de format. Je m’attendais à ce que ce soit moins riche en interactions. C’est en partie vrai mais c’est compensé par des « plus » qui sont spectaculaires y compris en termes de qualité des échanges et d’expérience d’apprentissage par les participants. Il faut notamment beaucoup plus de retours sur soi car au fond ce qu’on recherche c’est de développement personnel. » Alain Biriotti, membre de Codesign-it et de l’équipe pédagogique du DipCo.
Si l’idée de faire du DipCo une formation 100% digital n’est pas d’actualité, l’expérience de cette session est riche d’enseignements et invite à faire évoluer les pratiques actuellement en place pour le présentiel. C’est une question que se posait déjà le collectif avant le confinement. Ces premiers éléments de réponses, imposés par une contrainte certes, feront assurément bouger les lignes et les offres de formation proposées par le collectif pour aller vers des formules plus hybrides, mélangeant davantage présentiel et à distance.
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